Le Musée Tumbas Reales qu’on connaît également sous le nom du « Musée du Seigneur de Sipan » a été ouvert en 2002. Il se trouve à Lambayeque, à 15 min du centre-ville de Chiclayo dans la région de Lambayeque sur la côte au nord du Pérou.
Là, au beau milieu d’un ensemble urbain il faut le dire assez insignifiant, s’élève une pyramide rouge au sommet tronqué renfermant une collection d’objets tous plus extraordinaires les uns que les autres.
Le site où on a découvert ce trésor se nomme la Huaca-Rajada. Il est plus connu aujourd’hui sous le nom de Sipan. Il se trouve à un peu plus d’1 h de Chiclayo dans la vallée des pyramides, la « vallée des rois » de cette partie nord du Pérou.
La remarquable culture Mochica
Parler du musée Tumbas Reales revient à évoquer la culture Moche ou Mochica qui s’est développée le long de la côte Nord entre les Ier et VIIème siècles de notre ère – soit plus de mille ans avant les Incas.
Nous parlons d’une culture qui s’étendait sur une longue bande côtière. Son centre était les Temples du Soleil et de la Lune, proche de Trujillo, mais elle s’étendait bien plus au nord et au sud.
Nous parlons d’une culture qui a maîtrisé le désert, qui a conquis des terres difficiles et en a fait des surfaces utiles et cultivables. Aujourd’hui, cela peut sembler tout à fait extraordinaire. La vérité est que si on connait un peu la région, cela l’est sincèrement.
Nous parlons d’une culture reconnue pour ces qualités architecturales, ses céramiques (voir Musée Larco à Lima), ses orfèvres.
Une découverte archéologique exceptionnelle
Au début de l’année 1987, une rumeur courait et on sentait venir comme une nouvelle ruée vers l’or. Une bande de pillards s’était emparée d’objets précieux découverts dans une tombe Mochica proche du village de Sipan, dans le nord du Pérou, dans la région de Lambayeque.
La police saisit chez des receleurs des pièces d’une incroyable richesse. Des sculptures, des objets représentant des jaguars, félins, des pièces de joaillerie sont ainsi découvertes. Rapidement on ne put nier qu’il y avait là matière à découverte majeure.
Le sauvetage nécessaire du trésor de Sipan
Mais il fallait faire vite car la nouvelle d’un trésor enfoui dans cette vallée se répandit rapidement. Le trésor aurait pu être perdu ou disséminé aux 4 coins du monde en passant dans les mains des trafiquants et receleurs d’objets d’art et de pièces archéologiques.
Dès le mois d’avril 1987, une équipe d’archéologues se constitua et commença les fouilles, avec l’aide de 2 étudiants … et défendue par 2 policiers !
Après plusieurs mois de fouilles, on mit à jour la chambre funéraire intacte d’un dirigeant de cette extraordinaire culture Mochica. Il fut alors certain qu’il s’agissait là d’un site extraordinaire. C’était la première fois que l’on découvrait une tombe intacte avec tout son contenu.
1987 marqua alors le début d’une extraordinaire aventure : une poignée d’archéologues disposant de peu de moyens, notamment au niveau sécurité, procédèrent aux fouilles et au sauvetage d’une des collections qui apparaitrait bientôt comme l’une des découvertes majeures de cette fin de siècle. N’a-t-on pas comparé la découverte du site à la découverte de la tombe de Toutankhamon en Egypte en 1922 ? Le magazine Newsweek avait titré dans son édition espagnole « Le Roi Toutankhamon du Nouveau Monde » en septembre 1993.
En matière de sécurité, les fouilles au Pérou ne sont pas de tout repos. Les sites sont souvent victimes des attaques des « huaqueros » ou pilleurs de tombes, à la recherche de trésors et d’or. Et d’or, métaux précieux et bijoux, le site de Huaca-Rajada en regorge. Il fallait rapidement définir une marche à suivre quant à la destination de ce trésor. D’abord pour le conserver et le restaurer. Ce fut pourquoi on envoya les pièces en Allemagne.
Le Musée Tumbas Reales
Le musée de Tumbas Reales est un des meilleurs musées du Pérou. Il contient plus de 2 000 œuvres en or, plus de 400 bijoux en or, argent et cuivre ainsi que des céramiques de haute qualité et des bijoux en plumes.
On y voit également l’arrangement funéraire du Seigneur de Sipan, ainsi que les offrandes qui y avaient été déposées. En effet, il a été enterré avec ses femmes principales et secondaires, un chien, deux lamas et un gardien. Afin d’assurer que le gardien reste bien à sa place, on lui avait d’ailleurs coupé les pieds. Le Seigneur de Sipan était le Seigneur suprême de la population Moche aux environs de l’an 300.
Sur le site, les archéologues ont également découvert les tombes antérieures de l’Ancien Seigneur de Sipan et du Sacerdote, le Prêtre.
Un lieu pour héberger cette fabuleuse collection
Il fallait un endroit pour exposer ces découvertes aux yeux du monde entier. On décida alors de construire un musée. Y est exposée une des plus fabuleuses collections en matière d’objets de l’époque Mochica. C’est un témoignage unique des us et coutumes de la période, aux alentours de 300 après JC.
Après quelques expositions dans des musées nord-américains, les pièces trouvent à Lambayeque, non loin du lieu de leur découverte, un asile à leur hauteur.
Le musée fut inauguré le 8 novembre 2002 et créa l’événement, avec non seulement cette collection incroyable mais également grâce à son audacieuse architecture. Les architectes ont dessiné une pyramide tronquée, sur les bases de ce que devait être la pyramide Moche dans laquelle fut trouvée la tombe du Seigneur de Sipan. On accède à l’entrée du Musée par une longue rampe, toujours sur le modèle de l’architecture Mochica.
Découvrir les profondeurs de la culture Mochica
Le musée a 3 niveaux qui se visitent en descendant comme on descendrait au cœur de la pyramide, sanctuaire du seigneur de Sipan.
On commence tout d’abord avec la projection d’un film retraçant l’aventure de Sipan et du musée. Ensuite, vous pouvez choisir d’effectuer la visite avec l’assistance d’un guide du musée.
Niveau supérieur
Les premières salles expliquent l’histoire de la culture Moche, leur environnement, la vallée, la pêche, l’agriculture, leur organisation sociale.
Un autre thème très important qui est abordé est le monde spirituel des Moche. Sur les céramiques de l’époque, on peut voir les divinités Moche. Leurs dieux, leur concept de vie (de la conception jusqu’à la mort) et leurs notions d’éternité y sont expliqués.
Deuxième niveau
Les premières découvertes sur le site y sont retracées : de la découverte du gardien du Seigneur jusqu’à la découverte de la « chambre funéraire » du Seigneur lui-même avec son trésor.
A cet étage également sont exposés les objets du Seigneur de Sipan : des ornements, des colliers, des parures, des diadèmes, des coiffes, des boucles d’oreille et de nez… Le tout est fait d’or, d’argent, de lapis-lazuli, de turquoises, de coquillages en provenance d’Equateur très précieux à l’époque, des plumes d’oiseaux colorés. On peut également admirer les textiles les plus finement tissés, des céramiques, des sculptures … En tous, le musée contient plus de 2 000 œuvres en or et plus de 400 bijoux en or, argent et cuivre.
On y constate également l’état dans lequel on a découvert ces pièces. On peut alors évaluer tout le travail de conservation et de restauration qui a été effectué en Allemagne, au Musée de Mainz.
Dernier niveau
Il retrace d’autres fouilles sur le site qui ont permis de mettre à jour d’autres tombes. Certaines sont encore plus anciennes que celle du Seigneur de Sipan, notamment celle du Vieux Seigneur de Sipan.
En tout, on a découvert une quinzaine de tombes avec chacune des offrandes, plus modestes que celle du Seigneur. Cela a donné au site la fonction de Sanctuaire.
Une fin de visite à la hauteur du site
La visite du Musée Tumbas Reales se termine par une salle où l’on peut voir en mannequins de cire la « casa real del Señor de Sipán », soit la cour du Seigneur. Ce dernier se tient en son centre. Ce sont là quelques 35 mannequins animés grâce à un mécanisme afin de les rendre réalistes. Le tout avec une lumière étudiée et de la musique réalisée avec des instruments natifs.
Dans cette représentation, le seigneur est entouré au plus près de ses proches puis à gauche par les autorités religieuses et les musiciens et à droite par son armée.
Tout un travail scientifique a été réalisé sur la physionomie des mannequins, pour être le plus fidèle possible aux peuples Mochica, ainsi que sur les tissus, les vêtements et l’attitude de ces personnages.
Une visite à la boutique du musée ?
A la boutique du Musée Tumbas Reales, on trouve quelques reproductions de pièces du musée et quelques livres. Et au Pérou, on n’y échappe pas : un distributeur de glaces.
Heureusement, on a enfin réédité l’édition espagnole du livre « SIPAN, Descubrimiento e Investigación » de Walter Alva, l’un des premiers archéologues présents dès 1987. Lors de ma précédente visite, en juillet 2015, l’ouvrage disponible était une catastrophe en matière d’impression et de qualité graphique. Cette réédition est venue rejoindre la version anglaise dans ma bibliothèque.
Mais il faut bien avouer que pour un musée d’une telle richesse, il faudrait une boutique un peu plus à la hauteur : plus de surfaces, plus d’objets, et surtout plus de livres car le thème Mochica est immense et sans fin… On n’est pas à Lima certes, mais je pense que cela le mériterait pour un musée à vocation internationale.
Informations pratiques
Le ticket pour le Musée Tumbas Reales s’achète dès l’entrée du Domaine. Le musée est ouvert de 9 h à 17 h. Attention : le musée est fermé tous les lundis.
Il faut laisser sac à main, sac à dos, appareil photo à une consigne gratuite.
Certains reprocheront au musée Tumbas Reales son côté trop bien ordonné, trop étudié. Mais le fait est que cela est très bien fait et qu’il s’agit d’un musée tout à fait exceptionnel.
D’autres lieux pour comprendre la culture Moche dans la région
La Huaca Rajada
Pour ceux qui désirent visiter le lieu même de la découverte de ce qui est exposé au musée Tumbas Reales, il est possible de se rendre à la Huaca Rajada. Depuis 2009, le site bénéficie aussi d’un musée sur place : on y pratique notamment quelques démonstrations d’artisanat.
Les pyramides et le musée de Tucume
Le site se trouve à un peu moins de 40 km de Chiclayo. Le musée est plus modeste mais très didactique. Une bonne halte si vous vous dirigez de la côte vers Olmos et les Andes.
Les alentours de Trujillo
Pour suivre sur le thème fascinant de la culture Moche, découvrez les sites autour de Trujillo, à 220 km au sud de Chiclayo. Ne ratez pas les Temples du Soleil et de la Lune, ni le complexe archéologique d’El Brujo et la célèbre señora de Cao.
